Formation en santé et sécurité

Écouter les membres, connaître ses droits et aiguiser son regard

Publié : 06/09/2024

Une vingtaine de métallos sont assis.es en rectangle dans la salle de cours du Centre de formation des Métallos à Brossard. On y trouve surtout des nouveaux et nouvelles délégué.e.s à la santé et sécurité ainsi que des représentant.e.s à la santé et sécurité (RSS ou représentant.e.s à la prévention, comme le définissait l’ancienne loi). Bienvenue au cours d’introduction à la santé et sécurité du travail.

« Merci de votre implication, merci d’être là », lance le formateur Nelson Roy au début de la séance de trois jours. Lui-même impliqué en santé et sécurité dans la section locale 6586 chez ArcelorMittal à Contrecœur, il multipliera les exemples concrets tirés de son expérience, tout comme son confrère formateur Éric Blondin de chez Métal Vulcain.

Dès les premières minutes, chacun.e décrit son milieu de travail, son militantisme syndical et ce qu’il ou elle espère apprendre du cours. 

Rapidement, le groupe se questionne sur les dangers dans les milieux de travail. Les exemples fusent : « dans les matières premières qu’on utilise, il y a beaucoup de contaminants »; « dame nature avec la chaleur, la glace ; les risques de chute »; « les dangers de se couper »; « les mouvements répétitifs et les charges lourdes qui entraînent des maux de dos et d’épaules »; « le bruit »; « le manque d’espace entre les machines »; « les ponts roulants »; « les chariots élévateurs »; le manque d’équipement de protection individuel (EPI) ou des EPI inadéquats pour la tâche et inadaptés à la morphologie des travailleur.euse.s; etc.

Action syndicale

Progressivement, la formation évolue vers l’action syndicale pour améliorer les choses et soutenir les travailleur.euse.s dans l’exercice de leurs droits.

« Ça commence toujours par l’écoute des travailleur.euse.s… et ça finit toujours par un suivi », résume le formateur Nelson Roy, en invitant les participant.e.s à impliquer le plus possible les membres, à les écouter et à les tenir au courant.

Les outils à la disposition des délégué.e.s en santé et sécurité ou des RSS sont nombreux : la demande au ou à la superviseur. euse; la plainte formelle qui doit être abordée en comité paritaire de santé et sécurité; l’enquête d’accident faite conjointement avec le ou la représentant.e du syndicat et de l’employeur; la consultation du registre des blessures; l’appui aux travailleur.euse.s qui refusent un travail dangereux; l’appel à la CNESST pour une inspection; etc.

Sébastien Héloin, représentant à la santé et sécurité au Canadien Pacifique, témoigne d’une idée originale pour sensibiliser les travailleur.euse.s : « Le Syndicat a fait inscrire les noms des enfants de nos membres sur les gants de travail, pour rappeler qu’on a des enfants vers qui on veut revenir le soir. »

Les participant.e.s sont invité.e.s à être stratégiques dans leur travail syndical pour laisser des traces de leurs interventions et amener les employeurs à investir dans la sécurité du travail. « Quand on fait de la prévention, il y a moins d’accidents, moins de maladies professionnelles. C’est gagnant-gagnant pour les employé.e.s et pour l’employeur », explique le formateur Éric Blondin, citant en exemple la campagne menée dans son milieu de travail pour que l’employeur forme davantage les nouveaux et nouvelles.

« Votre œil va s’aiguiser, et à un moment donné, vous allez tout remarquer », insiste Nelson Roy. Du même souffle, il invite les militant.e.s à préserver leur équilibre de vie, vu la nature très prenante des fonctions syndicales : « Donnez-vous des trucs pour passer du temps de qualité en famille. »

Des idées plein la tête

C’est complètement galvanisé.e.s, avec plein d’idées concrètes en tête pour faire vivre le contenu de leur formation à leur retour dans leur milieu de travail, que les membres du groupe quittent Brossard le vendredi après-midi.

« J’ai hâte de retourner dans mon usine », lance finalement Patrice Vinet de chez Outils Gladu en Montérégie, SL 9414, qui entend apporter à ses consœurs de travail de la documentation sur la prévention spécifique aux femmes. « Je vais aller fouiller dans le registre des blessures et accidents pour analyser ce qui pourrait être corrigé », annonce Kevin Tchoreret de la SL 8897 chez ArcelorMittal, à Longueuil. « La présence sur le terrain, ça va être mon cheval de bataille », renchérit Marc Ladouceur de la SL  6486 chez CEZinc.

 

Pourquoi s'impliquer?

Antonin Lacoursière-Roberge - Mécanicien industriel à l’usine de légumes en conserve Nortera Food à Saint-Césaire, agent de grief et représentant à la santé et sécurité, SL 9414.

« Je me suis blessé gravement à ma première job à 20 ans. J’ai appris que ça n’arrivait pas juste aux autres. Des choses aussi banales que porter ses équipements de protection et se cadenasser [pour indiquer à ses collègues qu’on travaille sur une machine], ça me tient vraiment à cœur! Ce que j’ai vécu, je ne veux pas que d’autres le vivent. »

 

 

 

Marc Ladouceur - Technicien en gaz naturel depuis 25 ans chez CEZinc à Salaberry-de-Valleyfield, SL 6486, et délégué à la santé et sécurité depuis 1 an.

« Dans mon usine, il y a environ 300 travailleur.euse.s sur 400 qui ont moins de 5 ans d’ancienneté, dont mon garçon, qui est entré à l’usine il y a moins de 1 an. J’ai envie d’aider à établir de bons standards en santé et sécurité, j’ai l’impression que ça se dégrade récemment. Je veux revenir à des niveaux qu’on a déjà connus avant. Je veux faire ça pour les jeunes. »

 

 

 

 

Zacharie Saint-Laurent - Mécanicien d’entretien au concasseur chez ArcelorMittal à Fermont, SL 5778, délégué à la santé et sécurité depuis 1 an.

« J’ai travaillé dans une scierie avant d’être chez Mittal, c’était un enfer. Il n’y avait pas de garde sur les machines, il manquait de cadenas. Je me suis blessé souvent, là-bas, mais aussi depuis que je suis chez Mittal. J’en avais assez de me blesser, j’ai voulu améliorer mon environnement de travail. J’aimerais faire une job qui a de l’allure, pas juste de la parure. Quand tu arrives à la mine, il y a des affiches avec des messages de prévention partout, mais ça se cache les yeux devant les risques. Le pouvoir syndical, c’est de mettre de la pression pour changer les choses. »

 

 

Des droits fondamentaux

Au fil de la formation, on insiste sur trois droits fondamentaux protègent les travailleur.euse.s en matière de santé et sécurité au travail : l'employeur doit maintenir un lieu de travail sûr, les travailleur.euse.s ont le droit de refuser les tâches dangereuses, et les travailleuses enceintes peuvent bénéficier d'un retrait préventif pour protéger leur santé et celle de leur enfant. Ces mesures sont cruciales pour garantir un environnement de travail sécurisé et respectueux de la santé de chacun.

 

Un milieu de travail sain et sécuritaire

L’employeur est toujours légalement responsable de ce qui se déroule sur les lieux de travail. C’est à lui de s’assurer que le milieu de travail est sain et sécuritaire.

Pour ce faire, il doit éliminer à la source les dangers pour la
santé, la sécurité et l’intégrité des travailleur.euse.s, et établir des mécanismes de participation des travailleur.euse.s.

Si les dangers ne peuvent être éliminés, l’employeur doit prendre des moyens pour les réduire et fournir des EPI adéquats. Il doit également poursuivre ses efforts pour éliminer les dangers.

 

Droit de refuser un travail dangereux

Un.e travailleur.euse a le droit de refuser d’exercer un travail qui met en danger sa santé ou son intégrité (physique ou psychologique). Il ou elle doit alors aviser son ou sa supérieur.e immédiat.e, qui convoque un.e représentant.e du syndicat. Après discussion, les trois peuvent s’entendre sur un correctif à apporter ou encore demander l’intervention d’un.e inspecteur ou inspectrice de la CNESST, qui tranchera.

C’est dans une convention collective Métallos qu’on a vu pour la première fois apparaître le droit de refus, en 1962 à la Dominion Steel, qui a fait des petits jusqu’à l’inscription dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail en 1979.

 

Retrait préventif

Un droit au retrait préventif existe pour la travailleuse enceinte ou celle qui allaite et dont le travail comporte des dangers pour elle-même, pour l’enfant à naître ou pour l’enfant qu’elle allaite. La travailleuse peut alors être affectée à d’autres tâches sécuritaires ou encore être indemnisée par la CNESST pour la période de la grossesse (jusqu’à quatre semaines avant la date prévue) ou celle de l’allaitement.

Un.e travailleur.euse exposé.e à un contaminant et dont la santé est altérée peut aussi bénéficier d’un retrait préventif et être affecté.e à d’autres tâches sécuritaires, ou être retiré.e du travail.

* Cet article est tiré du dernier numéro du magazine Le Métallo

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