Daniel Green et le chrysotile
Où est passé l’homme de science ?
Dans une chronique qu’il a signée dans le Journal de Montréal, l’environnementaliste et toxicologue Daniel Green y va d’une charge à fond de train contre l’amiante dans la foulée des condamnations sans appel faites par le Nouveau parti démocratique (NPD) et le Congrès du travail du Canada (CTC). « Nous sommes étonnés que l’homme de science n’ait pas fait appel au principe de précaution que sa discipline scientifique devrait pourtant lui avoir enseigné. Sa contribution se résume à amplifier cette campagne hystérique qui amalgame les amphiboles et le chrysotile, deux fibres fort différentes lorsqu’il s’agit de biopersistance. Il passe également sous silence la dangerosité des produits de substitution dont on connaît peu de choses. Il prend position avant même le dépôt du rapport d’un comité d’experts scientifiques de Santé-Canada sur la question. Il fait enfin abstraction de tout le savoir et l’expertise que les travailleurs ont développés dans les mines pour extraire le chrysotile et l’utiliser de façon sécuritaire. Pour un scientifique, cela fait pas mal d’oublis en même temps », a déclaré Daniel Roy, directeur québécois du Syndicat des Métallos (FTQ).
« Nous l'invitons à venir consulter les études scientifiques qui ont été présentées lors de la Conférence internationale sur l’amiante chrysotile qui s’est tenue à Montréal, en mai 2006. Nous espérons qu’il ne fera pas comme le NPD qui a refusé d’en prendre connaissance comme l’Institut du chrysotile le lui avait proposé. Nous l’invitons également à venir rencontrer les travailleurs sur les lieux de travail. Il n’y a rien de tel pour un scientifique que l’expérience sur le terrain pour comprendre la réalité », a poursuivi le leader syndical.
Biopersistance
Selon le Dr David M. Bernstein, un spécialiste en toxicologie dont les recherches s’appuient sur plusieurs études effectuées au cours des dix dernières années sur la biopersistance respective tant de l’amiante chrysotile que de l’amiante amphibole dans les poumons, il existe des différences significatives entre ces deux fibres. « Après son inhalation, explique-t-il, la fibre du chrysotile est rapidement évacuée des poumons contrairement aux amphiboles, ces fibres d’amiante aujourd’hui interdites. Une étude toxicologique fait état d’une expérience au cours de laquelle des animaux ont été exposés pendant 90 jours à des fibres du chrysotile avec une norme 500 fois plus élevée que celle communément acceptée d’une fibre par centimètre cube. En même temps, d’autres animaux ont été exposés pendant cinq jours à des amphiboles. Ils ont développé des pathologies sévères alors que ceux qui avaient été exposés aux fibres du chrysotile avaient un état de santé semblable à ceux qui n’avaient pas été exposés à l’une ou l’autre des fibres ».
«Pourquoi s’acharner sur une fibre que nous maîtrisons alors que la population est exposée régulièrement à plus de 2800 substances potentiellement dangereuses dont 835 sont cancérigènes. L’Agency for toxic substances and disease registry des États-Unis classe l’amiante chrysotile au 119e rang quant à sa toxicité, devancée par le plomb, le béryllium, le cobalt, le méthane et le nickel. Qu’attend le fondateur de la Société pour vaincre la pollution et membre du Sierra Club of Canada pour lancer d’autres campagnes de bannissement ? », a fait valoir Daniel Roy.
Resserrer les normes de sécurité
« Nous sommes préoccupés par les questions de l’environnement. Nous avons d’ailleurs établi avec notre syndicat international une alliance stratégique avec le Sierra Club. Le problème, ce sont les compagnies qui refusent de respecter les normes le plus strictes. Le Québec a adopté les normes les plus élevées sur la planète et s’est donné comme objectif d’enseigner ces normes ailleurs dans le monde. Si l’extraction et l’utilisation de l’amiante chrysotile disparaissent au Québec, d’autres pays prendront le relais. Auront-ils la même préoccupation que nous avons de suivre le produit partout dans le monde pour s’assurer du respect des normes sécuritaires d’utilisation ? », s’est interrogé le directeur québécois des Métallos.
Les produits de substitution sont mal connus
Daniel Roy a conclu en parlant des produits de substitution dont Daniel Green n’a pas glissé un traître mot. «Nous reconnaissons, dit-il, comme la communauté scientifique, que l’amiante chrysotile fait partie d’une vaste gamme de produits naturels ou synthétiques qui comportent un danger pour l’être humain. Mais, nous croyons que nous devons apprendre à manipuler ces produits de façon sécuritaire. La position des travailleurs miniers de Thetford Mines est basée sur l’expérience. Plutôt que de prendre des risques avec des produits que l’on connaît mal, pourquoi ne pas continuer d’utiliser un produit connu et que l’on contrôle. Plusieurs fibres de remplacement de l’amiante chrysotile comme les fibres artificielles, les fibres réfractaires de céramique, les fibres de laine isolante et les fibres de laine de roche sont très mal connues. Elles sont soupçonnées d'être cancérigènes. Il n’y a aucune étude épidémiologique de longue durée permettant de déterminer leur niveau de toxicité. Une seule évaluation de la toxicité des fibres de verre, de céramique et des laines de roche a été réalisée en 1988 en Suisse. L’étude a conclu que les fibres de céramique augmentaient les risques de tumeurs et n’a pas connu de suite. Le lobby des produits de substitution fait un travail de dénigrement de l’amiante chrysotile en public et de promotion en coulisse de produits mal connus au détriment de la santé publique ».
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Pour informations : Daniel Roy, Syndicat des Métallos (FTQ), (514) 850-2240