Rencontre avec la première permanente métallo Le sexisme est venu de la partie patronale
Le comité de la condition féminine a célébré en 2017 son 30e anniversaire. Il en a coulé de l’eau sous les ponts depuis cette date. Les femmes ont fait leur entrée dans plusieurs métiers non traditionnels, dans plusieurs usines. Le syndicat s’est aussi diversifié, accueillant dans ses rangs plusieurs accréditations du secteur des services. Tout cela a fait augmenter le nombre de femmes au sein du Syndicat des Métallos. Pour prendre la mesure d’une page de cette histoire, Le Métallo a rencontré la première représentante syndicale au sein des Métallos.
Le 4 décembre 1984, Isabelle Duranleau devenait la première femme représentante syndicale aux Métallos. Auparavant présidente de son syndicat local chez Federal Pioneer en Montérégie, elle avoue candidement n’avoir jamais pensé qu’elle deviendrait un jour représentante syndicale au sein du Syndicat.
Elle aspirait néanmoins à de nouveaux défis. Après avoir poursuivi des études de soir, elle décroche un nouveau poste. Quand elle a annoncé qu’elle partait de son travail syndiqué, les Métallos lui ont offert un poste de permanente : « il y avait une forte volonté au sein du Syndicat des Métallos d’intégrer une première femme à l’équipe des permanents syndicaux ».
Dès son arrivée, l’équipe la prend sous son aile. « J’étais un peu comme une petite sœur… les autres permanents étaient de bons conseillers, leur porte était toujours ouverte. » Elle n’a jamais senti qu’on la traitait différemment.
Le sexisme, c’est plutôt du côté patronal qu’elle l’a ressenti. « Ils étaient habitués, avec les Métallos, de négocier avec des hommes », laisse-t-elle tomber. Lors d’une négociation, un avocat patronal multipliait les commentaires sur sa tenue. « Il y avait une robe en particulier qu’il aimait beaucoup. Lorsque j’ai terminé la négociation, je l’ai roulée dans un paquet et je la lui ai envoyée », raconte-t-elle l’œil malicieux.
« Mets ça dans ta pipe ! ».
Au cours de sa carrière, elle croit avoir posé parfois un regard différent sur certains dossiers, plus à l’écoute des enjeux liés aux femmes. Elle veillait systématiquement à introduire des dispositions sur les retraits préventifs, les congés de maternité ou encore la conciliation travail-famille.
Le travail de permanent demande de grands sacrifices : « Parfois, à deux heures du matin, des gars en grève appellent et tu n’as pas le choix d’y aller…. Tu embarques dans ton char et tu fais les 2 heures de route. » Cette réalité n’a pas été facile à vivre pour Isabelle, alors mère monoparentale d’un adolescent.
Dans ses contacts avec les militantes syndicales, la permanente syndicale aujourd’hui retraitée, a toujours eu à cœur d’impliquer davantage les officières dans la vie syndicale. « Mais les entraves à leur implication sont nombreuses : le manque de temps, leur vie de famille, le conjoint qui n’est pas toujours d’accord… Il faut que les femmes prennent leur place », conclut-elle.
Mélanie Tremblay